Petits usages du noisetier

« Dans les haies, des noisetiers il y en a partout » raconte Raymond.  D’autres l’appellent « la coude » ou « le coudrier ». Pour le paysan ou le jardinier, le noisetier présente de nombreux atouts : c’est un bois souple, facile à travailler qui  convient bien pour les objets longs.
Les enquêtes menées auprès des anciens en Normandie ont révélé qu’une vingtaine d’objets étaient  facilement fabriqués.
A la ferme : Gaule, réquêt ou gaulet, perche, tendeur à peaux de lapin, manches d’outils, hart, fourchet, trique, baguette de sourcier, bâton de marche.
Au jardin : Cordeau, pique-chou, rames à haricots, rames à pois.
Jeux d’enfants : Lance-pomme, lance-pierre, bûchettes

Gaule à pommes : Les noisetiers les plus vigoureux poussent bien droit. On peut ainsi confectionner de longues gaules légères. Pour gauler les pommes, il ne faut pas frapper sur les branches comme une brute mais utiliser la flexibilité du bois de noisetier pour agiter les branches sans abimer les bourgeons.  A la fin de la saison, les gaules sont remisées à l’arrière du pressoir ou de la grange.
Quand on est assez jeune et peu enclin au vertige, on monte dans les pommiers les plus chargés en fruits pour abattre les pommes. On se sert alors d’une courte gaule, le réquet,  pour atteindre les fruits peu accessibles. « Quand mon père secouait une grosse branche, il pouvait faire tomber une « pouche » de pommes. » Le Pin  « J’ai un gaulet, petite gaule à pommes pour monter dans les pommiers ». Saint-Martin-de-Fresnay
Dès la fin du mois de juillet, les pommiers commencent à ployer sous le poids des fruits. Pour éviter que les branches ne se brisent, on les soutient avec des perches. Les pommes sont ainsi hors de portée des vaches même si on les entrave avec des « piétins ».

Ce petit bâton fourchu permet de redresser « l’herbe versée » quand on fait les talus, la faucille d’une main, le fourchet dans l’autre.

« Pour faire les harts, en général c’était la coude. Mais aussi avec les repousses  de chêne. Le père Couraye, il avait le coup, il en faisait en moins de deux pour lier les fagots. Ça se fait quand la sève marche. En mars, avril, ça se tordait mieux.  On faisait à mesure. En général,  c’était solide. Ça ne coutait pas cher, mais c’était moins rapide que le fil de fer.  C’était surtout pour faire des bourrées au pied, tu appuyais au pied, ça serrait, on tirait dessus avec le hart. J’aimais ça. » Francis,  Saint-Pierre-de-Mailloc

Tendeur à peaux de lapin ; Autrefois dans les fermes, lorsque l’on tuait un lapin, sa peau était mise à sécher dans un grenier sur un tendeur ou une fourche en noisetier dans l’attente du passage du marchand de peaux de lapins. Le prix de vente des peaux était dérisoire. « Ma mère nous remettait cette maigre recette qui était placée dans notre tirelire ». Le Pin

Quand on coupe une haie, on sélectionne les branches les plus droites et au diamètre adéquat pour confectionner tous les manches d’outils qui cassent fréquemment, de la binette à la fourche à fumier. On pèle  l’écorce du bois encore vert à la plane, « sur le banc à planer pour écorcer le noisetier ou peler le noisetier ». Ablon

« Je tresse trois pousses de coude ensemble. Je les attache et les laisse pousser au moins deux ans. Ça  fait une jolie canne ». René, Grandmesnil
« Mon père refaisait les barreaux des râteliers avec du noisetier pelé. » Renée, Saint-Désir-de-Lisieux
Le sourcier, celui « qui a le don de trouver l’eau» utilise uniquement une baguette fraiche de noisetier qu’il cueille dans la haie la plus proche. «  Dans ma ferme, quand j’ai décidé de creuser un puits pour abreuver tous les animaux, le patron de l’entreprise de forage a déterminé l’endroit où creuser avec une baguette de sourcier. » Saint-Pierre-de-Mailloc, 1990
Quand on change les veaux ou les bœufs d’herbage, il faut avoir une bonne trique pour les faire avancer, les arrêter ou les empêcher de se diriger dans une mauvaise direction. A utiliser avec modération. On ne frappe pas les vaches laitières que l’on doit pouvoir approcher chaque jour pour les traire. En revanche, on ne pénètre jamais dans la cour au taureau sans une grosse trique qui stationne toujours à l’entrée de l’herbage.

Pique-chou en noisetier

Le « haricot à rames » est une plante grimpante qui a besoin d’être tuteurée « Dès que les haricots réclament les rames ». Ils s’enroulent autour de baguettes de noisetier fixées deux par deux par le jardinier. L’hiver venu, les rames sont soigneusement remisées pour être réutilisées l’année suivante.
Contrairement aux haricots, le pois s’accroche aux rames avec des vrilles comme la vigne. Les branches d’orme en forme d’arrête de poisson convenaient bien pour le soutenir. Le noisetier a remplacé l’orme disparu des haies vers 1980.
« Mon grand-père était fier de montrer ses poireaux alignés « au cordeau ». Manerbe

Bûchettes en rameaux de noisetier dans un cahier de 1937, école de Grandmensil (14)

« Quelques jours après la rentrée des classes du cours préparatoire,  la maîtresse  nous a demandé d’apporter une dizaine de buchettes pour apprendre à compter. » Ecole Le Pin, 1963
Les « mauvais gamins » fabriquent facilement des lance-pierre qui peuvent s’avérer dangereux. Les plus intrépides s’en servent pour casser les carreaux des maisons abandonnées. « J’étais très adroit avec le lance-pierre. J’abattais un pigeon à 20 mètres, mieux qu’avec un fusil. » Pont-L’évêque.  « Dans les élingues, des fois on mettait des billes. » Thiéville.  « Lance-pierre pour tirer les merles ». Patrick, Clarbec
« Quelques jours après la rentrée des classes du cours préparatoire,  la maîtresse  nous a demandé d’apporter une dizaine de buchettes pour apprendre à compter. » Ecole Le Pin, 1963
Le lance pomme sert à multiplier la forme du bras.

A découvrir l’atelier découverte « Les petits usages du noisetier » sur les évènements à suivre…