Vignons ou ajoncs

Au sommet des plateaux du Pays d’Auge, en lisière des bois et le long des dunes du littoral, pousse l’ajonc d’Europe… 

Solide arbuste aux épines redoutables, l’ajonc (Ulex europaeus)  est communément appelé « vignon » en Pays d’Auge. Les défrichements de la fin du XIXe siècle pour augmenter les surfaces herbagères destinées à la production laitière  ont repoussé cet arbuste aux confins des bois. Toutefois, celui-ci ne cherche qu’à repousser vigoureusement. Seuls le pâturage et le travail de fauche l’empêchent de reconquérir l’espace.
En 1828, le botaniste Louis-Alphonse de Brébisson avait observé des cultures d’ajoncs appelées  « vignonnières » autour de Falaise. Elles servaient de combustible pour les fours à chaux.

Le botaniste normand Auguste Chevalier dans la Revue de botanique appliquée et d’agriculture coloniale en 1941 émet l’hypothèse que « même en France, il n’est pas certain qu’elle soit spontanée dans les stations où elle est pourtant abondante ». Il suppose qu’elle aurait été introduite et cultivée comme plante fourragère. (voir « Les Ulex comme engrais verts et plantes fourragères »)

Les botanistes contemporains normands, comme Michel Provost, ne retiennent cependant pas cette hypothèse.

De solides épines
À la crèche et dans le torchis

Autre usage inattendu : à Montviette, au XVIIIe siècle, au lieu-dit l’Orée,  on a mêlé des  brins d’ajoncs et de callune à l’argile pour rendre plus solide le torchis d’une maison en pan de bois.

Madeleine raconte que dans la ferme de son père « pendant l’hiver quand il n’y avait plus rien à manger, on écrasait des tiges de vignons pour les donner aux lapins ».

Quand il n'y avait plus rien
Comme une haie morte

Liliane se souvient que son père allait à la lisière des bois du Billot chercher des vignons. « On les coupait à la faux et  on les redescendait avec les chevaux et le chartis. On plantait des piquets tous les deux ou trois mètres et de chaque côté. On bourrait les branchages entre les piquets et on serrait avec un appareil à vis et à manivelle. Et on serrait avec du fil de fer.  C’était pour clore des herbages où il y avait des trous : ça faisait comme une haie morte. »

Et Denise parle de cette autre coutume à Sainte-Marguerite-des-Loges : « On allait cueillir de l’ajonc en fleur pour mettre dans la crèche. On enfilait une vieille chaussette pour se protéger la main. »

Auguste Chevalier, né le 23 juin 1873 à Domfront et mort à Paris le 4 juin 1956, a dirigé la Revue de botanique appliquée de 1921 à 1953.